Là où le présent rencontre le passé - ISSN 2562-7716

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D’autres narrations : les arts comme moyen de représenter l’histoire

Dans le cadre de l’exposition «Remember | Resist | Redraw : une histoire radicale du « Canada » en images» présentée à l’Université de Montréal, Tiohtiá:ke / Montréal jusqu’en avril prochain, s’est tenue la table-ronde «D’autres narrations : les arts comme moyen de représenter l’histoire».

La discussion visait à explorer les possibilités qu’offrent les médiums artistiques et les arts visuels pour revisiter les récits dominants et pour visibiliser les groupes qui ont été marginalisés par le récit historique dans ce qui est aujourd’hui connu comme le Québec et le Canada.

Ce panel a permis d’ouvrir une réflexion sur les moyens à mettre en œuvre pour que ces groupes se réapproprient la narration de l’histoire dans leurs propres termes, et aussi, de réfléchir à la manière dont les arts graphiques peuvent être des espaces d’affirmation et de résistance.

La table-ronde animée par Adèle Clapperton-Richard a réuni quatre panélistes, qui ont présenté leur travail artistique et d’éducation : Lateef Martin, Fanny Aïshaa, Emanuelle Dufour et Kijâtai-Alexandra Veillette-Cheezo. La participation de Chris Robertson, qui ne pouvait être présent en personne, s’est faite par le biais d’une vidéo personnelle.

Les présentations et les échanges ont notamment soulevé l’importance des représentations et de l’inclusivité, la nécessité de montrer la véritable histoire coloniale de ce qui est aujourd’hui connu comme le Canada et le Québec et surtout le besoin de partager les histoires de résilience, de résurgence et d’autodétermination de ceux et celles qui luttent contre l’effacement, l’oubli et la marginalisation. Les arts graphiques peuvent ainsi devenir les moyens de transmettre ces autres récits, qui devraient être enseignés et valorisés dans les espaces éducatifs, médiatiques et artistiques.

Bon visionnement!

 

 

Mise en récit et explication historique dans l’enseignement de l’histoire au Québec : enjeux épistémologiques et perspectives critiques*

Par Adèle Clapperton-Richard, candidate à la maîtrise en histoire à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et membre du comité éditorial d’HistoireEngagee.ca

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Livres rouges. Crédit : Betty B (Flickr).

Résumé

L’enseignement de l’histoire au Québec a fait l’objet de virulents débats qui ont récemment animé l’espace public et médiatique. La querelle, qui divise les tenants d’une histoire nationale et ceux qui prônent une histoire plus sociale ou culturelle, a soulevé les enjeux de la mise en récit de l’histoire et de la manière avec laquelle la raconter et l’enseigner. Malheureusement, les contributions apportées à ce « faux débat » ont trop souvent délaissé les enjeux épistémologiques au profit de la question identitaire. Nous souhaitons ainsi revenir sur l’intelligibilité du récit en histoire et sur sa valeur explicative, pour énoncer la possible réconciliation entre une histoire-récit et une histoire dite scientifique. C’est ultimement l’adoption d’une méthode ethnographique, qui suppose un double processus descriptif et analytique, qui permettrait la construction d’une « histoire-récit-scientifique » critique.

Mots-clés

enseignement de l’histoire; didactique de l’histoire; mise en récit; épistémologie; récit ethnographique

Introduction

Nous souhaitons ici proposer une analyse critique qui puisse contribuer à démêler certains enjeux d’un débat qui a récemment occupé l’espace public et médiatique : celui sur l’enseignement de l’histoire au Québec. Les éléments déclencheurs qui ont fait naître cette réflexion se trouvent dans certains des – très nombreux, soulignons-le – textes publiés depuis 2011 dans Le Devoir principalement[1], et La Presse. Ce débat « classique », entre les partisans d’une histoire nationale et ceux qui préconisent une approche sociale, a été réintroduit sur le plan médiatique en parallèle, d’abord, des critiques adressées à la réforme ministérielle de 2006, puis face à la volonté gouvernementale de remanier les programmes d’enseignement de l’histoire au secondaire depuis 2014. Elle n’a toutefois pas créé de grande surprise, du moins du côté de la communauté historienne habituée à ces confrontations idéologiques depuis la fin des années 1950. Nous ne nous engagerons pas ici à décortiquer les positions de l’École de Montréal ni de celles de Laval; ce travail a déjà été exécuté, notamment, dans les articles de Jocelyn Létourneau, « Quelle histoire d’avenir pour le Québec[2] », et de François-Olivier Dorais, « Classifier et organiser la production historiographique au Québec[3] », de même que dans l’ouvrage collectif L’histoire nationale à l’école québécoise. Regards sur deux siècles d’enseignement[4]. Il ne s’agira pas non plus de présenter une analyse qui risquerait trop facilement de tomber dans la critique morale, voire moralisatrice, de la manière avec laquelle s’enseigne l’histoire au Québec actuellement. Le but est plutôt de chercher à éclaircir ce qui semble être parfois un ensemble quelque peu confus d’idées et d’idéologies qui contribuent à alimenter un débat qui, loin d’être résolu, continue de mobiliser des intervenants et intervenantes tant dans les médias que les milieux scientifiques et universitaires. 

Chronique éditoriale 5. Participer au dynamisme de la discipline et commenter une humanité en mouvement : HistoireEngagée.ca à la croisée des chemins

Par Adèle Clapperton-Richard (UQAM) et Catherine Larochelle (Université de Montréal), co-coordonnatrices d’HistoireEngagée.ca

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Une nouvelle phase… déjà bien entamée

Chaque nouveau trimestre amène l’occasion à la fois de dresser un bilan de ce qui a été fait, créé et pensé à HistoireEngagée.ca au cours des quatre derniers mois et d’énoncer et d’imaginer les possibles à venir pour la revue. Si, depuis deux ans, HistoireEngagée.ca a considérablement augmenté et régularisé son rythme de publication, l’automne 2018 et le début de l’hiver 2019 ont nettement confirmé ces tendances. Seulement de septembre à décembre derniers, ce sont plus de 32 000 consultations qui ont eu lieu sur le site de la revue, soit près de la moitié du total des consultations pour l’année 2018. La revue a aussi élargi son mandat et a reçu de multiples retours et reconnaissances de la communauté académique et de la société. Nous commençons donc l’année, et cet éditorial, en clamant avec une fierté et une confiance assumées qu’HistoireEngagée.ca est entrée dans une nouvelle phase de son histoire : elle est désormais un lieu incontournable de l’histoire publique pratiquée en français.

Il faut dire que cet automne, l’équipe d’HistoireEngagée.ca s’est à nouveau renouvelée avec l’intégration de Florence Prévost-Grégoire au sein du comité éditorial, permettant ainsi à la revue d’élargir ses attaches jusqu’à l’University College Dublin, en Irlande. Histoire Engagée.ca a aussi étendu et consolidé des liens avec des collaborateur.trice.s de divers milieux. Nous avons publié, pour la seconde fois sur notre plateforme, une affiche qui fait partie du projet Remember | Resist | Redraw, mené par le Graphic History Collective, un collectif d’artistes, de militant.e.s et d’historien.ne.s basé dans l’ouest du Canada. La revue s’est également associée au blogue anglophone Borealia : A Group Blog On Early Canadian History pour diffuser en français et en anglais un débat historiographique sur le système seigneurial en Nouvelle-France. Ces collaborations permettent de faire le pont entre plusieurs publics, historiens et non-historiens, ainsi que francophones et anglophones.

Des rapports de pouvoir qui dérangent

Par Marie-Hélène Brunet, professeure, Faculté d’éducation, Université d’Ottawa, Adèle Clapperton-Richard, candidate à la maîtrise en histoire, UQAM, Widia Larivière, éducatrice aux droits humains et aux droits des peuples autochtones, cofondatrice de la branche québécoise du mouvement Idle NoMore et Philippe Néméh-Nombré, doctorant en sociologie, Université de Montréal

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Nous avons été consterné-e-s à la lecture de l’article « Des retouches qui dérangent », à la une du Devoir du 19 novembre dernier, présentant les réactions de deux historiens, Denys Delâge et Gilles Laporte, sur les corrections apportées aux manuels d’histoire concernant les représentations des Premières Nations.

Les voix mises de l’avant dans l’article

Nous avons aussi trouvé « aberrant » et « absurde » (pour reprendre leurs propres mots) que la parole soit donnée à ces deux seuls historiens, allochtones. Ceci nous semble révéler une dynamique issue de rapports inégaux de pouvoir, leur permettant de se retrouver à la une pour réagir et valoriser leur opinion. Car, outre la brève citation de la sous-ministre Barcelo, l’article ne relaie aucune autre voix. Si les journalistes indiquent d’abord que le Conseil en éducation des Premières Nations « n’a pu être joint » (sans préciser la teneur de ces tentatives), rien n’indique (ni dans l’article ni dans les quelques précisions publiées en complément le lendemain) qu’ils ont tenté d’obtenir l’avis d’historien-e-s ou enseignant-e-s issu-e-s d’une nation autochtone. Trois jours plus tard, le 22 novembre, le Conseil en éducation des Premières Nations (CEPN) et l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL) ont d’ailleurs réagi en publiant leur propre communiqué dans lequel ils « déplor[ai]ent l’acharnement médiatique qui fait porter aux Premières Nations la responsabilité des changements apportés aux livres d’histoire du Québec » ainsi que « [l] e discours rétrograde et colonial qui [leur] a été servi dans les médias ».

Affiche du GHC – Librairies radicales à Montréal dans les années 1930

Affiche par Adèle Clapperton-Richard
Introduction par Andrée Lévesque

Au mois de janvier 2017, le Graphic History Collective (GHC) a lancé Remember | Resist | Redraw: A Radical History Poster Project, un projet destiné à offrir une perspective artistique et critique aux conversations entourant Canada 150. Le projet a continué et est encore en marche pour l’année 2018.

Au mois de juillet dernier, le collectif a fait paraître la seizième affiche, réalisée par Adèle Clapperton-Richard en collaboration avec Andrée Lévesque, qui s’intéresse aux librairies radicales communistes à Montréal dans les années 1930 comme des espaces d’éducation et d’organisation militantes.


Durant la Crise économique des années 1930, le Parti communiste du Canada occupe une place prééminente dans l’organisation des mouvements de protestations, en particulier dans l’organisation des sans-travail. Parmi leurs outils de mobilisation, la presse, les tracts, les livres, souvent venus de Moscou, jouent un rôle important alors que les librairies qui les distribuent s’exposent à la répression des forces de l’ordre.

Depuis des siècles les écrits contribuent à la conscientisation des travailleuses et des travailleurs, et les librairies de gauche forment un lieu privilégié de politisation et de réseautage. Ce qui a souvent poussé les autorités, soucieuses de protéger l’ordre social, à tenter de contrôler la parole écrite et les endroits qui la disséminent. Au Canada, entre 1919 et 1935, l’article 98 du Code criminel est invoqué contre la sédition ainsi que la littérature et les paroles séditieuses.

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