Par Benoit Marsan, doctorant en histoire à l’UQÀM et collaborateur pour HistoireEngagee.ca

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Le colloque "Question sociale et citoyenneté" se tiendra à l'UQÀM du 31 août au 2 septembre 2016. Plus de détails ici.

Le colloque « Question sociale et citoyenneté » se tiendra à l’UQÀM du 31 août au 2 septembre 2016. Plus de détails ici.

François Deschamps est candidat au doctorat en histoire à l’UQAM sous la direction de Martin Petitclerc et Donald Fyson. Il a complété un mémoire de maîtrise en histoire en 2011, sous la supervision de Jean-Marie Fecteau, dans lequel il a analysé le discours radical tory au Bas-Canada, de 1835 à 1840, sa source documentaire largement inédite étant le journal Montreal Herald. Son mémoire lui a valu le 3e prix de la Fondation Jean-Charles Bonenfant. Une version adaptée de ses recherches a été publiée en 2015 aux Presses de l’Université Laval, sous le titre La « rébellion de 1837 » à travers le prisme du Montreal Herald, la refondation par les armes des institutions politiques canadiennes[1].


Benoit Marsan : Comment s’articule la question sociale dans le Bas-Canada des années 1830 et plus particulièrement comment se pose-t-elle à la lumière des rébellions de 1837 et 1838??

François Deschamps : Bonne question, un peu embêtante même. La considération du contexte global des années 1830 est fondamentale. Dans l’historiographie des dernières années, le concept de « révolution atlantique » joue un rôle englobant. La période s’ouvre avec la guerre civile britanno-américaine (1774-1783), relayée par les phases de radicalisation et d’extension de la Révolution française à l’Europe puis aux Amériques avec l’effondrement du système colonial espagnol et portugais. Le ferment secret de toute cette période de turbulence a trait peut-être au scandale de la traite des Noirs et à l’esclavagisme. Le haut risque de révolte effraie les élites coloniales. Après 1815, en dépit de la Pax britannica, les poussées démocratiques continuent à perturber l’ordre social en Angleterre jusqu’au Reform Bill de 1832 où les bases de la démocratie parlementaire moderne sont jetées. L’aspiration républicaine des Patriotes se situe à la queue de cette nébuleuse. On ne peut lui rendre justice sans la recadrer dans le contexte de tutelle coloniale britannique et le mouvement migratoire de masse en partance des îles britanniques vers l’Amérique du Nord. À la fin du premier tome de la Démocratie en Amérique, Tocqueville prend en bloc d’ailleurs le monde anglo-américain et évalue le sort des perdants : les esclaves noirs, les Amérindiens et, quand on lit bien, en filigrane, les Canadiens.