Par Jean-Philippe Warren, sociologue et professeur à l’Université Concordia
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Dans Parti pris, l’expression « Révolution tranquille » se retrouve pour la première fois, en octobre 1963, dans sa désignation originale anglaise. L’image ci-dessus est tirée de l’article de Jean-Marc Piotte, « Du duplessisme au FLQ », Parti pris, no. 1, octobre 1963, p. 29. Merci à Camille Robert pour le traitement de l’image.
Comme le soulignent Julie Bélanger et Paul Poirier dans un article très éclairant, le mot « révolution » est employé dans les journaux, dès l’élection de Jean Lesage, pour décrire les transformations qui s’annoncent[1]. Afin d’en préciser le sens, on lui accole alors, entre autres, l’adjectif sociale, pacifique, nationale, politique, législative, silencieuse, démocratique, économique ou intellectuelle[2]. Il n’est pas encore question de Révolution tranquille. D’où vient donc, peut-on se demander, cette expression qui s’est désormais imposée pour désigner la période de changements socioéconomiques initiée par le scrutin du 22 juin 1960 ? Aux éléments de réponse déjà donnés par Bélanger et Poirier, je souhaite, dans la présente contribution, apporter quelques précisions complémentaires.
Le mystère des origines
On a fait cent mystères autour de l’expression Révolution tranquille. Maints chercheurs réfèrent à un article de The Globe and Mail dans lequel apparaîtrait pour la première fois l’expression anglaise, mais personne n’est en mesure d’en donner la source exacte[3]. Le jeune chercheur Olivier Dickson est allé jusqu’à contacter la rédaction du journal torontois afin de mettre la main sur la citation en question, mais sa démarche est restée lettre morte[4].