Par Rachel Nadon, doctorante à l’Université de Montréal
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Les héritages littéraires et intellectuels de la Révolution tranquille, ce sont bien sûr les idées qui se sont concrétisées en institutions et en ministères, les discours qui ont circulé, les œuvres qui ont été lancées et que l’on lit encore – les Aquin, Blais, Ducharme, par exemple; ce sont aussi les « lieux de discours » comme les revues littéraires. Cette année, Les Écrits a eu 61 ans, Liberté, 56 ans, Études françaises, 51 ans. Ces périodiques qui s’intéressent à la création, à la critique et à l’essai sont apparus à un moment crucial de la formation de l’institution littéraire québécoise et constituent en elles-mêmes des institutions : l’histoire de ces revues fait partie de l’histoire littéraire.
Les enjeux d’héritages, de transmission et de filiations se posent, pour les animateurs et les animatrices de ces revues, sur deux plans : celui de l’espace de discours, transmis, à animer et à façonner pour son époque; et celui de la revue comme réservoir de textes importants et inscrits dans l’histoire littéraire. Comment les membres qui se succèdent à la tête de ces revues modèlent-ils le lieu, en fonction de quoi et de qui ? Quels rapports établissent-ils avec l’histoire, l’héritage et la mémoire de l’espace discursif lui-même, ainsi qu’avec le legs « textuel » et « littéraire » ? Chaque équipe se positionne (ou non, ce qui est aussi significatif) en rapport avec les grandes figures de la revue, et façonne tour à tour le lieu de parole à partir de leur bibliothèque, de leur conception de la littérature, de l’écrivain.e et du politique.