Les sources cléricales de la laïcité publique au Québec

Publié le 29 septembre 2013

Par Jules Racine St-Jacques, candidat au doctorat  en histoire à l’Université Laval

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Le père Georges-Henri Lévesque, o.p., lorsqu'il était membre de la Commission Massey. Division des archives de l’Université Laval – P151/D/5/5,4 Fonds Georges-Henri Lévesque – Photos relatives à la Commission royale d’enquête sur l’avancement des arts, lettres et sciences au Canada. – The National Film Board - 1949.

Le père Georges-Henri Lévesque, o.p., lorsqu’il était membre de la Commission Massey.
Division des archives de l’Université Laval, P151/D/5/5,4, Fonds Georges-Henri Lévesque, 1949.

Selon toute apparence, la Charte des valeurs québécoises retiendra l’attention des élus cet automne. Et il semble bien que le nœud du problème repose dans l’article qui traite des signes ostentatoires des employé-e-s de l’appareil étatique et paraétatique (écoles, hôpitaux, CEGEP, universités, etc.). On ne s’étonnera pas de ce que la lutte pour la laïcité publique ait des racines fort anciennes au Québec et qu’il se soit trouvé, parmi les catholiques des XIXe et XXe siècles, des laïques[1] plus hardis qui aient souhaité que l’Église manifeste sa présence au monde de manière moins oppressante. Ne pensons qu’aux querelles entre catholiques libéraux et ultramontains durant la seconde moitié du XIXe ou, sur un registre plus radical, aux vilipendes anticléricales des T-D Bouchard, Eugène L’Heureux ou Jean-Charles Harvey au siècle suivant. En revanche, on sera peut-être surpris d’apprendre que l’idée d’un espace public déconfessionnalisé revient notamment à des hommes d’Église.

Au mois de décembre 1945 paraît dans la revue de coopération Ensemble! un court texte du père Georges-Henri Lévesque intitulé « La non-confessionnalité des coopératives ». Fondateur en 1938 de l’École des Sciences sociales de l’Université Laval, fondateur en 1940 du Conseil supérieur de la coopération, cet intellectuel engagé porte de nombreux chapeaux. Lorsqu’il publie son article, cependant, c’est en sa qualité de religieux qu’il se prononce. En ces années, comme il s’en souviendra plus tard, « ça prend un curé[2] » pour affirmer les choses qu’il a à dire. Son propos est fort simple. Invoquant la Somme théologique de saint Thomas, le père Lévesque rappelle que la confessionnalité – entendu ici comme la manifestation extérieure de la foi intérieure – est un « principe affirmatif » qui, bien qu’il oblige toujours le croyant, ne l’oblige pas à tout instant[3]. Il est des circonstances où elle n’est pas de mise. Il faut confesser sa foi lorsque, par exemple, ne pas la confesser pourrait porter à croire qu’on n’en a pas. À l’inverse, si la manifestation de sa foi trouble l’ordre de la Cité, alors il convient de ne pas la confesser.

Or, dans la société pluraliste et moderne qu’est déjà le Québec des années 1940, les activités socio-économiques comme la coopération ne nécessitent plus la tutelle du clergé. La coopération, dès ses débuts, a été investie par ses animateurs de l’ambition pacificatrice et universelle du commerce. Participant à l’accroissement du bien commun, l’idée coopérative ne reconnaît pas les frontières, qu’elles soient partisanes, raciales ou religieuses. En empêchant, par exemple, certains juifs ou protestants de participer à la mission coopérative canadienne-française, l’étiquette catholique nuirait à la coopération économique. Pis encore, elle risquerait de troubler l’ordre social, suscitant « l’hostilité et le mécontentement » des « infidèles » qui ne se reconnaîtrait pas dans l’affichage de la confessionnalité[4]. Sans aller jusqu’à proposer la neutralité des coopératives – un terme inacceptable à l’époque, car synonyme d’incroyance -, Georges-Henri Lévesque croit qu’elles doivent être non-confessionnelles, c’est-à-dire qu’elles s’abstiennent d’afficher extérieurement tout signe d’appartenance religieuse tout en adhérant intérieurement à la foi[5]. La coopérative, écrivait-il, « de soit, n’exige pas la confessionnalité, pas plus qu’un club de hockey, par exemple, n’a l’obligation d’être confessionnel[6]. »

D’un point de vue actuel, la distinction entre neutralité et non-confessionnalité peut sembler insignifiante. En 2013, il y a longtemps que les caisses populaires Desjardins, les coopératives de commerce ou les mutuelles d’assurance ne sont plus liées d’aucune façon à l’Église. À l’époque, toutefois, l’article du père Lévesque résonne comme un coup de tonnerre dans le ciel québécois. Le religieux s’attire les foudres d’une bonne part des autorités diocésaines et provoque un débat qui aura pour effet d’entrouvrir la porte à la déconfessionnalisation de l’espace public au Québec. La colère de ses opposants sera telle qu’ils intenteront deux procès contre lui au Vatican, demandant, en vain, sa destitution du poste de doyen de la Faculté des Sciences sociales.

Le dominicain n’émet pourtant qu’un constat factuel : en 1945, la très vaste majorité des coopératives enregistrées auprès du Secrétariat de la Province n’affichent aucun caractère confessionnel[7]. Comme il le dira lui-même, il n’inventait « pas une réalité nouvelle. Il s’agissait bien plutôt de la définir clairement[8]. » Mais peu importe les faits, il s’agit ici d’une lutte de principes qui engageait bien davantage que les seules coopératives. Les adversaires du père Lévesque ne sont pas dupes: ils ont bien compris qu’à travers la question à l’étude, l’article « étalait des principes, fournissait une clé pour une déconfessionnalisation plus élargie[9]. » Pour l’appuyer dans les hostilités qu’il a soulevées, Lévesque sollicite le soutien de ses supérieurs, notamment du provincial de son ordre, le père Pie-Marie Gaudrault, qui, dans un opuscule fort populaire paru en mars 1946, dénonce en des termes encore plus vigoureux l’oppressante présence cléricale au pays de Maria Chapedelaine :

Dans notre Province, on accuse déjà trop le clergé d’être un « Trust » et de vouloir mettre la main sur tout. Là où les laïques peuvent sainement, honnêtement et avec compétence conduire leurs affaires profanes, selon les principes de la morale chrétienne, pourquoi, dans un pays comme le nôtre où les races, les religions et les langues sont multiples, ce qui crée un problème très complexe et épineux, pourquoi introduire en tout, dans leurs affaires propres, la confessionnalité extérieure? Le mieux est souvent l’ennemi du bien[10].

En défendant l’existence de domaines étrangers à la juridiction de l’Église sur les âmes, Gaudrault, à la suite de Lévesque, revendique un espace de légitimité pour l’expression de sociabilités profanes et affirme toute sa confiance dans la capacité du laïcat à porter fidèlement le message chrétien sans supervision cléricale immédiate. Les intellectuels dominicains se réfèrent en cela à la distinction du philosophe personnaliste français Jacques Maritain entre agir en chrétien, conformément aux valeurs chrétiennes, et agir en tant que chrétien, c’est-à-dire en engageant l’Église avec soi. Dans le domaine des choses profanes comme celui de l’activité économique, nul besoin pour l’institution d’associer l’Église à ses activités pour les conduire dans le respect de la doctrine sociale catholique.

Aux yeux des dominicains, le catholicisme, l’adhésion au message professé par l’Église catholique de Rome, est un phénomène de conscience, il relève de l’intime avant tout. La foi n’exige pas d’être affichée constamment pour être vécue pleinement: « Ce n’est pas, écrit Gaudrault, l’étiquette extérieure qui rend catholiques les opérations de l’organisation[11]. » Pour lui comme pour le père Lévesque, il est tout à fait possible d’envisager une société déconfessionnalisée, c’est-à-dire dépourvue de symboles religieux, mais néanmoins animée par la morale sociale que soutient la croyance en Dieu. Plutôt que les institutions, le catholicisme doit viser les personnes. À travers elles, en leur inspirant une éthique valorisant l’engagement, l’autonomie et l’authenticité dans un esprit de justice et de charité, il rechristianisera les institutions et la société en général. Dans leur discours, la déconfessionnalisation d’espaces publics tels que les coopératives de production, d’épargne et de commerce n’apparaît donc pas comme un compromis, et encore moins comme une compromission à l’égard d’une Modernité triomphante. Elle participe plutôt d’un élan réformateur qui aspire à transformer l’Église en réinvestissant l’énergie catholique dans le cœur battant des institutions et non plus dans leur parement officiel; en infusant en chaque fidèle une foi intelligente aux fondements bien compris.

Au cœur de la tourmente soulevée par le projet de la bien mal nommée « Charte des valeurs québécoises », il est opportun de se rappeler que le combat pour la non-confessionnalité au Québec fut jadis mené par des hommes d’Église catholiques qui croyaient que la foi n’était rien si elle n’était que façade. À leurs yeux, le retrait des apparats confessionnels n’aurait su altérer la solidité du lien qui unit le croyant à son Dieu. Est-ce à dire que s’ils vivaient encore, les pères Lévesque et Gaudrault se prononceraient en faveur de la Charte des valeurs? Je l’ignore. Le propre de l’historien-ne n’est pas de répondre aux angoisses du présent avec les paroles du passé, mais de rendre raison de celui-ci[12].

Toutefois, à défaut d’apporter des réponses définitives aux problèmes qui secouent la sphère médiatique et politique à l’heure actuelle, l’étude du débat sur la non-confessionnalité des coopératives permet de soulever certains questionnements pertinents, mais pourtant quelque peu écartés du débat en cours. L’affichage des signes religieux par le personnel étatique et paraétatique trouble-t-il l’ordre de la polis québécoise? Quelle valeur revêt le symbole confessionnel pour les religions en cause? La Charte fait-elle une distinction entre l’institution et l’individu qui la représente? Les fonctionnaires agissent-ils en croyants ou en tant que croyants lorsqu’ils exhibent les symboles de leur appartenance confessionnelle? Telles sont les interrogations qui, je crois, peuvent être importées du passé pour éclairer le présent.

La déconfessionnalisation de l’espace public proposée dès l’après-guerre par quelques-uns de ses représentants les plus éminents annonçait un mouvement de redéfinition du rapport entre l’Église et la société québécoises. Sous la plume des intellectuels dominicains, l’Église acceptait pour la première fois et irréversiblement de passer du statut de structure sociale – par le truchement notamment de son appareil de contrôle moral – à celui de déterminant culturel au sens anthropologique. Qu’on ne s’y méprenne pas: l’Église était déjà, à l’époque, partie prenante de la culture canadienne-française par son influence sur les mœurs, sur les croyances, sur la ritualité, sur la production artistique, sur les rapports amicaux, amoureux, familiaux, associatifs, etc. Cependant, en se retirant officiellement des échanges économiques, elle acceptait sans le savoir de n’être plus que cela: un référent culturel qu’elle espérait dominant.

Ce que les principaux artisans de cette déconfessionnalisation ignoraient, cependant, c’est que le retrait du catholicisme ne s’arrêterait pas là: de la non-confessionnalité, le Québec passera rapidement à la laïcité. Bientôt, il ne serait plus uniquement question pour le clergé de se faire moins visible tout en poursuivant son apostolat auprès des âmes, mais d’abandonner toutes leurs œuvres séculières aux laïques. De moins en moins pratiquants, ceux-ci conjugueront à la laïcisation[13] des institutions la sécularisation[14]des esprits. D’institution culturelle au sens large du terme, l’Église passera à l’état de référent culturel au sens étroitement patrimonial.

En s’attaquant au triomphalisme catholique, le débat sur la non-confessionnalité des coopératives a donc amorcé le passage d’une Église présente au Monde à une Église passée, ou de l’Église comme institution du présent à l’Église comme institution du passé. En ce sens, il marque bel et bien un jalon important dans l’histoire soudaine et brutale de l’effondrement du catholicisme au Québec. Sans aller jusqu’à prétendre que les dominicains ont volontairement miné les fondations déjà sclérosées de l’édifice ecclésiastique, à tout le moins peut-on affirmer que leur intervention a légitimé l’expression d’un inconfort de plus en plus partagé par les laïques et certains clercs à l’endroit de la place occupée par le clergé et par la religion dans la société. En soulevant un débat majeur sur un enjeu d’apparence mineur, ils ont exposé le décalage ressenti entre l’attitude d’un clergé traditionaliste et triomphaliste et les aspirations religieuses d’une part croissante des laïques qui ne pouvaient plus se satisfaire d’une foi endormie par la routine, le psittacisme et le cléricalisme:

Rappelez-vous la structure « catholique » de nos institutions, même politiques. Elle s’était édifiée peu à peu, avec la connivence – bien intentionnée, il ne faut pas en douter – de toute l’élite de notre société. Elle représentait des cadres intangibles et inflexibles. On les jugeait utiles, voire indispensables; reste à savoir s’ils étaient si nécessaires. Sûrs d’eux-mêmes et possédant la clé de tous nos problèmes, ne menaçaient-ils pas la liberté et la créativité? Bien articulés et sécurisants, ne visaient-ils pas à favoriser la bonne conscience plus que la vérité, la pratique religieuse plus que la conviction personnelle? Confessionnalité en tout, partout, apprêtée à toutes les sauces et sans discernement, représentait la panacée indiscutable[15].

Si, comme le précisait Georges-Henri Lévesque, ses collègues et lui ont voulu faire éclater les cadres confessionnels, ce n’était assurément pas dans l’espoir de voir la société évacuer toute marque d’appartenance extérieure à la religion, ce qui constitue l’acception la plus courante de la laïcisation. Au contraire, leur opposition à la confessionnalité se voulait une marque de confiance envers les laïques: les pères dominicains les croyaient parfaitement capables de mener leur vie en catholiques, sans avoir constamment à s’afficher comme tels. C’est précisément cette idée de la laïcisation qui, consacrée par le Concile Vatican II, s’est délitée quelque part entre l’après-guerre et nos jours.

L’actualité politique nous renvoie aujourd’hui des échos de ce passé. Elle nous rappelle notamment que le christianisme, cette « religion de la sortie de la religion » comme l’écrivait l’historien Marcel Gauchet[16], a depuis quelque temps déjà reconnu – voire même accepté – son statut de simple référent identitaire pour la majorité de la population québécoise qui ne fréquente plus ses temples et ne pratique plus les cultes de ses diverses confessions. Si elle accompagne encore de nombreux individus à travers les différents rites de passages de la vie – naissance, mariage, mort –, et si ses liens légaux avec l’État sont encore nombreux, l’Église catholique ne peut désormais plus se réclamer d’une autorité souveraine sur les âmes et elle le sait. Pour bon nombre de ses ministres, le Québec est redevenu une terre de mission, avec l’humilité que cela suppose. Ainsi, s’ils défendent bien le caractère sacré du crucifix à l’encontre de la représentation patrimoniale à laquelle le Gouvernement du Québec voudrait le réduire, les évêques québécois se montrent aussi ouverts à ce que les responsables gouvernementaux le retirent de l’Assemblée nationale, comme ils l’ont déclaré le 19 septembre dernier[17]. Ce faisant, l’assemblée épiscopale acquiesce de nouveau au principe non-confessionnalité de l’espace public revendiqué publiquement par deux de ses religieux pour la première fois il y a quelque 68 ans.

Or, peut-on en attendre autant des religions minoritaires qui ne peuvent évidemment se réclamer du même « champ d’expérience[18] » que le catholicisme dans l’espace québécois? Cette question s’impose, particulièrement lorsqu’on considère que les religions juive, musulmane, sikhe ou hindoue, pour ne prendre que les exemples les plus courants, n’exigent pas de leurs fidèles le même mode de vie que le christianisme de la majorité. Souhaitons que le débat qui s’ouvre ces jours-ci apporte une réponse sereine à ces questions. À travers le tumulte incessant des opinions de chacun, le devoir de mémoire qui incombe à l’historien-ne consiste entre autres à rappeler que la laïcité au Québec fut d’abord consentie – bien que douloureusement – de l’intérieur de l’Église, et non décrétée de l’extérieur.

Pour en savoir plus

GAUCHET, Marcel. Le désenchantement du monde. Une histoire politique de la religion. Paris, Gallimard, 1985, 306 p.

GAUDRAULT, Pie-Marie. Neutralité, non-confessionnalité et l’École sociale populaire. Montréal/Ottawa, Les éditions du Lévrier, 1946.

KOSELLECK, Reinhart. Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques. Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1990, 334 p.

LAFILLE, Julien. « Les évêques ne s’opposeraient pas au retrait du crucifix de l’Assemblée nationale ». Radio-Canada (19 septembre 2013). [En ligne]http://www.radio-canada.ca/regions/mauricie/2013/09/19/001-eveques-charte-valeurs-quebecoises.shtml.

LAMONDE, Yvan. L’heure de vérité. La laïcité à l’épreuve de l’histoire. Montréal, Delbusso, 2010, 221 p.

LÉVESQUES, Georges-Henri Lévesque. « La non-confessionnalité des coopératives ». Ensemble!, vol. 6, no 10 (décembre 1945), p. 4.

LÉVESQUE, Georges-Henri. Souvenances. T. II: Remous et éclatements. Montréal, Éditions La Presse, 1988, 307 p.

ROUTHIER, Gilles, « Quelle sécularisation? L’Église du Québec et la modernité ». Dans CAULIER, Brigitte, dir. Religion, sécularisation, modernité. Les expériences francophones en Amérique du Nord. Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 1996, p. 73-96.

SKINNER, Quentin. La vérité de l’historien. Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2012, 67 p

TAYLOR, Charles. L’âge séculier, Montréal, Boréal, 2011, 1344 p.

WARREN, Jean-Philippe et E.-Martin MEUNIER. Sortir de la « grande noirceur » : l’horizon personnaliste de la Révolution tranquille. Montréal, Septentrion, 2002, 207 p.


[1] Nous entendons par « laïques » et « laïcat » la communauté informelle de croyants qui, ne faisant pas partie du corps clérical, se reconnaissent néanmoins en tant que baptisés comme appartenant à l’Église catholique romaine.

[2] Georges-Henri Lévesque, Souvenances. T. II: Remous et éclatements, Montréal, Éditions La Presse, 1988, p. 172.

[3] Georges-Henri Lévesque, « La non-confessionnalité des coopératives », Ensemble!, vol. 6, n10 (décembre 1945), p. 4.

[4] Idem.

[5] Idem.

[6] Idem.

[7] En effet, seule une infime minorité de coopératives affichaient officiellement leur appartenance confessionnelle. En exceptant les cinq coopératives affiliées à l’Union des cultivateurs catholiques, une seule des 537 coopératives en activité entre 1931 et 1943 recensées dans le registre des syndicats coopératifs tenu par le Secrétariat de la Province de Québec se disait officiellement catholique. Notons toutefois la présence, au nombre des syndicats non enregistrés qui ont soumis des états financiers, de cinq associations officiellement hébraïques.

[8] Geroges-Henri Lévesque, Souvenances. T. II…, p. 175.

[9] Idem., p. 179.

[10]Pie-Marie Gaudrault, Neutralité, non-confessionnalité et l’École sociale populaire, Montréal/Ottawa, Les éditions du Lévrier, 1946, p. 19. Le provincial reprenait là une plainte déjà formulée privément dans Pie-Marie Gaudrault, « Réponse aux « notes » à propos de l’article « La non-confessionnalité des coopératives » », 1946, p. 1. Archives de l’Ordre des prêcheurs à Montréal (AOPM), fonds Georges-Henri Lévesque (GHL), Confessionnalité – Confessionnalité iiia, janvier-février 1946.

[11] Ibid., p. 17.

[12] Sur cette distinction essentielle, on lira avec profit la brève mais éclairante conférence de Quentin Skinner parue récemment aux éditions de l’EHESS: Quentin Skinner, La vérité de l’historien, Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2012, 67 p.

[13] La laïcisation est ici entendue dans son acception courante, c’est-à-dire qu’elle désigne le phénomène institutionnel par lequel les activités de l’Église et de l’État en viennent à être conçues séparément et le processus social souvent concomitant en fonction duquel les références religieuses sont retirées de l’espace public en général (espace médiatique, milieux associatifs, lieux de travail, établissements de services sociaux, etc.) et confinées progressivement à des lieux circonscrits (lieux de culte, de résidence, etc.).

[14] La sécularisation doit être comprise à la manière de Charles Taylor comme le phénomène culturel par lequel la croyance en Dieu devient une option parmi d’autres pour expliquer son univers mental, environnemental et social et qui plus est, une option contestée, voire honnie. Charles Taylor, L’âge séculier, Montréal, Boréal, 2011, p. 15.

[15] Georges-Henri Lévesque, Souvenances. T. II…, p. 197.

[16] Marcel Gauchet, Le désenchantement du monde. Une histoire politique de la religion, Paris, Gallimard, 1985, p. II.

[18] L’expression est de l’historien allemand Reinhart Koselleck, Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1990, p. 307-329.