Pour l’Université de l’Ontario français

Publié le 22 novembre 2018

Avec deux lignes de son énoncé budgétaire, le gouvernement de Doug Ford a annoncé le 15 novembre dernier l’abolition de l’Université de l’Ontario français. Joint à la fermeture du Commissariat aux services en français, ce geste atteint les droits acquis des francophones de l’Ontario à l’éducation postsecondaire exclusivement dans leur langue, des droits qu’ils ont obtenus de haute lutte avec la création de l’Université le 1er juillet dernier. À notre connaissance, il s’agit d’un précédent dans le monde contemporain : pour la première fois, un État abolit une université pour des considérations budgétaires. Ce précédent remet en cause le rôle accordé au haut savoir et le maintien d’une communauté, principes au cœur même de notre vie en société

Au-delà de la simple préparation à l’emploi, une université est une institution cruciale dans toute communauté. C’est encore plus le cas si celle-ci est minoritaire. L’université, est un lieu d’émancipation et de responsabilisation. Grâce à la formation des personnes et au développement des connaissances, elle habilite les citoyens et les citoyennes à l’exercice de leurs droits. En étant en contact avec le haut savoir, il est possible de faire des choix éclairés et de contribuer pleinement à son épanouissement individuel comme collectif.

De plus, en produisant et en diffusant une culture et une langue, une université permet à toute communauté d’assurer sa permanence dans le temps et sa pertinence au monde. Les bienfaits de l’institution universitaire ne se limitent pas aux seuls individus qui la fréquentent : ils rayonnent vers l’ensemble de la communauté en cherchant à répondre à ses multiples besoins et attentes.

Pour ces raisons, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies stipule par son article 13. 2-c. que l’« enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l’instauration progressive de la gratuité ». Dans son article 24, la Déclaration universelle des droits linguistiques précise que toute communauté linguistique « a le droit de décider quel doit être le degré de présence de sa langue, en tant que langue véhiculaire et objet d’étude, et cela à tous les niveaux de l’enseignement au sein de son territoire : préscolaire, primaire, secondaire, technique et professionnel, universitaire et formation des adultes ».

Abolir une université, c’est attenter directement à ces principes. C’est nuire à l’émancipation des citoyens et des citoyennes en empêchant leur accès au haut savoir et en brimant l’exercice plein et entier de leurs droits. C’est aussi entraver la constitution du lien social et le maintien du bien commun. Lorsqu’il s’agit d’une communauté comme celle de l’Ontario français, une communauté confrontée depuis longtemps au défi quotidien de sa permanence, le geste est encore plus préjudiciable et, à ce titre, intolérable.

Nous, historiens et historiennes de l’Institut d’histoire de l’Amérique française, du Québec, de l’Ontario français et d’ailleurs sommes particulièrement sensibles à l’enjeu de la vitalité des communautés francophones. Par notre mission institutionnelle et par notre engagement citoyen, nous partageons un devoir de solidarité avec les francophones de partout au Canada.

Profondément attachés.es aux principes de l’université et à l’exercice des droits des membres de toute une communauté, nous exigeons le rétablissement complet du financement originel de l’Université de l’Ontario français afin que cette institution puisse réaliser sa mission fondamentale, offrir des services d’éducation postsecondaire en français et ce, au bénéfice premier des membres de sa communauté. Nous affirmons également notre pleine et entière solidarité à l’endroit des membres de la communauté franco-ontarienne dont les droits aux services exclusifs en français viennent d’être bafoués. Nous saluons particulièrement l’engagement de la jeunesse franco-ontarienne à l’endroit de l’éducation postsecondaire en français, une langue internationale assurant la circulation des savoirs, une langue qui leur appartient.

Au nom de l’Institut d’histoire de l’Amérique française,

Brigitte Caulier, présidente

Karine Hébert, vice-présidente,

Martin Pâquet, ancien président

Louise Bienvenue, ancienne directrice de la Revue d’histoire de l’Amérique française

Ont signé cette lettre (en date du 21 novembre 2018):

Jean-René Thuot, UQAR

Jean-François Lozier, Université d’Ottawa

François-Olivier Dorais, UQAC

Magda Fahrni, UQAM

Laurent Turcot, UQTR

Martin Petitclerc, UQAM

Marise Bachand, UQTR

Yolande Cohen, UQAM

Jean-Philippe Garneau, UQAM

Julien Goyette, UQAR

Sylvie Taschereau, UTQR

François Guérard, UQAC

Stéphane Savard, UQAM

Jean Lévesque, UQAM

Claude Bellavance, UQTR

Janick Auberger, UQAM

Isabelle Bouchard, UQTR

Isabelle Perreault, Université d’Ottawa

Cylvie Claveau, UQAC

Nicolas Beaudry, UQAR

Alain Beaulieu, UQAM

Dany Fougères, UQAM

Claude La Charité, UQAR

Piroska Nagy, UQAM

Lucia Ferretti, UQTR

Julien Prud’homme, UQTR

Geneviève Dorais, UQAM

Yvan Rousseau, UQTR

John Drendel, UQAM

Joanne Burgess, UQAM

Denyse Baillargeon, Université de Montréal

Ollivier Hubert, Université de Montréal

Bernard Ducharme, UQAM

Catherine Larochelle, Université de Montréal

Samir Saul, Université de Montréal

Carl Bouchard, Université de Montréal

Michèle Dagenais, Université de Montréal

Maurice Demers, Université de Sherbrooke

Bruno Ramirez, Université de Montréal

Cynthia Milton, Collège de la Société royale du Canada et Université de Montréal

Jacques Perreault, Université de Montréal

Thierry Nootens, UQTR

David Meren, Université de Montréal

Dyala Hamzah, Université de Montréal

Susan Dalton, Université de Montréal

Camille Bégin, University of Toronto Scarborough

Paul Cohen, University of Toronto

Mairi Cowan, University of Toronto

Brian Gettler, University of Toronto

Dan Horner, Ryerson University

Eric T. Jennings, University of Toronto

Sean Mills, University of Toronto

Tom Peace, Huron University College

Daniel Rück, Université d’Ottawa

Guillaume Teasdale, University of Windsor

Luis van Isschot, University of Toronto

Ivan Carel, UQTR et UQAM

Samy Mesli, UQAM, UQO et Université de Montréal

Marie-Eve Ouellet, Université de Sherbrooke

Benoît Grenier, Université de Sherbrooke

Harold Bérubé, Université de Sherbrooke

Léon Robichaud, Université de Sherbrooke

Geneviève Dumas, Université de Sherbrooke

Patrick Dramé, Université de Sherbrooke

Jean-Pierre Le Glaunec, Université de Sherbrooke

Sophie Abdela, Université de Sherbrooke

Patrick Snyder, Université de Sherbrooke

Stéphanie Lanthier, Université de Sherbrooke

Peter Gossage, Université Concordia

Marie-Claude Thiffault, Université d’Ottawa

Réginald Auger, Université Laval

Patrick Baker, Université Laval

Johanne Daigle, Université Laval

Michel Fortin, Université Laval

Anne Klein, Université Laval

Jean-François Gauvin, Université Laval

Alain Laberge, Université Laval

Habib Saidi, Université Laval

Michel De Waele, Université Laval

Luc Lévesque, Université Laval

Jonathan Livernois, Université Laval

 

Pour appuyer la lettre de l’Institution de l’histoire de l’Amérique française, vous n’avez qu’à remplir le formulaire ci-dessous. Un courriel de confirmation vous sera envoyé et votre nom s’ajoutera à la liste au bas dès que vous aurez validé votre signature.

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Ont également signé les personnes suivantes:

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Noms:

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