Là où le présent rencontre le passé - ISSN 2562-7716

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Sport, culture et enjeu militaire en Grèce antique

Par Marin Sorasso-Bluem, M2 de recherche en Histoire – Mondes Antiques, Paris-Sorbonne

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Leonidas aux Thermopyles, par Jacques-Louis David (1814). Source : Musée du Louvre.

Leonidas aux Thermopyles, par Jacques-Louis David (1814). Source : Musée du Louvre.

Introduction

Au vu des récents événements sportifs contemporains, glorifiant le sport, la compétition et la fierté nationale, on peut se demander si cet esprit de pratique sportive a des échos dans l’histoire. Et pour ce faire, il convient de revenir aux origines de notre compétition olympique mondiale, inspirée du modèle grec et pourtant peut-être très différente. Si les Jeux Olympiques remontent à une réalité historiquement datée, la place de cet événement sportif change du tout au tout dans le monde méditerranéen antique : limitée géographiquement et culturellement au monde grec, cette compétition panhellénique rassemble des sportifs venant des familles les plus nobles et les plus fortunées de la Grèce, au sein d’un événement qui mêle communément religion et sport. Au-delà de ces jeux, il s’agit ici de voir la place particulière du sport dans ce monde qui a tant inspiré Pierre de Coubertin (1863-1937). Si les Grecs n’ont pas inventé le sport, ils sont à l’origine de la pratique de la « gymnastique » (de gymnos) signifiant « nu », des exercices physiques (gymnasia) sont pratiqués au sein du gymnasion (le gymnase), lieu emblématique. Quant à l’étymologie du mot « sport », elle est bien différente. Venant de l’ancien français disporter, le terme désigne une plus grande variété d’activités, du jeu physique à sa pratique intensive[1]. Nous utiliserons ainsi le mot sport dans son sens le plus vaste, pour désigner l’éducation des enfants, celle des homoioi spartiates, ou encore la pratique compétitive et l’entraînement militaire.

Défier l’ordre établi? Les femmes les plus fortes du monde

Par Élise Detellier[1]

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Si le phénomène historique des hommes forts est relativement bien connu au Québec – surtout depuis la sortie du film sur Louis Cyr –, celui des femmes fortes l’est moins, sans doute parce que la force est davantage une caractéristique masculine que féminine. Pourtant à la même époque que Louis Cyr, certaines femmes fascinent elles aussi les foules par leurs tours de force. Elles s’imposent alors dans un monde plus volontiers associé aux hommes, celui de la force physique et de la puissance musculaire, et narguent l’idéal féminin du tournant du XXe siècle selon lequel les femmes ont supposément une constitution physique plus frêle et délicate que celle des hommes. Qui sont ces femmes qui osaient défier l’ordre établi?

Il y a d’abord Marie-Louise Sirois[2]. Née à Sainte-Anne-de-la-Pocatière en 1866, elle quitte la région pour la Nouvelle-Angleterre à l’âge de douze ans. À dix-sept ans, elle étonne son entourage en soulevant deux ou trois fois de suite un baril de 243 livres à la hauteur d’un comptoir. Mais c’est à Salem, Massachusetts, à l’âge de vingt-cinq ans, qu’elle se fait remarquer pour ses exploits de force. Elle est alors dans le gymnase de son mari, l’homme fort Henri Cloutier, où quelques amateurs tentent sans succès de soulever un plateau contenant 400 livres d’haltère.  Comme elle ridiculisait leurs tentatives, elle se fait mettre au défi de réussir l’exploit, ce qu’elle parvient à faire du premier coup. Elle surmonte une nouvelle fois l’exploit le lendemain en ajoutant 75 livres de plus au plateau. Réunie pour l’occasion, la foule ébahie l’applaudit à tout rompre. Sa carrière de femme forte commence…

Louis Cyr, ou le pari de l’histoire. Compte-rendu du film « Louis Cyr : l’homme le plus fort du monde » (2013) du réalisateur Daniel Roby

Par Marc-André Robert, candidat au doctorat en histoire à l’Université Laval[1]

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Plusieurs critiques l’ont souligné, Louis Cyr: l’homme le plus fort du monde prend l’affiche au grand écran à un moment tout désigné où, ironiquement, le cinéma québécois a grand besoin d’être soulevé, d’être sauvé[2]. Les piètres recettes des productions québécoises lors des deux dernières années ne laissaient planer aucun doute; l’espoir suscité par cette sortie tant attendue se voulait à la hauteur de la légende qu’incarne Louis Cyr dans notre histoire. Double pari donc que celui de convaincre le public de préférer une (méga)production québécoise à la horde de blockbusters fraîchement sortis d’Hollywood (et pendant la saison estivale, rien de moins!) et de rendre justice à la mémoire de cet homme fort, de ce héros canadien-français. À la lumière des éloges qui ne cessent de l’accueillir[3] ainsi que de sa deuxième place au box-office pour l’ensemble du weekend de sa sortie (389 198 dollars), devancé à peine par la comédie américaine Grown Ups 2 (466 060 dollars)[4], on peut certainement féliciter ce pari (risqué) somme toute réussi. Du moins jusqu’à maintenant.

Louis Cyr et Horace Barré, respectivement interprétés par Antoine Bertrard et Guillaume Cyr. Cliquez ici pour visualiser la bande-annonce du film.

Louis Cyr et Horace Barré, respectivement interprétés par Antoine Bertrand et Guillaume Cyr. Cliquez ici pour visualiser la bande-annonce du film.

 

Sur les épaules d’un géant : entretien avec Hugo Girard autour de Louis Cyr et de la tradition de la force au Québec*

Par Pascal Scallon-Chouinard, doctorant en histoire à l’Université de Sherbrooke, et Mathieu St-Hilaire, historien et journaliste pigiste[1]

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Hugo Girard et son fils, Tyler Girard

Hugo Girard est sans contredit une figure marquante de l’espace sportif et culturel du Québec. Reconnu comme l’un des hommes les plus forts de la planète, il a une force et un caractère qui lui ont permis de s’illustrer dans des compétitions nationales et internationales. Son parcours est d’ailleurs impressionnant : finaliste, de 1998 à 2003, à la compétition du World Strongest Man; homme le plus fort du Canada de 1999 à 2004; homme le plus fort de l’Amérique du Nord de 2000 à 2001; champion du Wolrd Muscle Power de 1999 à 2000 (Écosse) et de 2001 à 2004 (Canada); champion du monde IFSA lors des Supers-Séries de 2002; détenteur de plusieurs records canadiens de dynamophilie, etc[2]. Dans la foulée de la sortie du film Louis Cyr (2013), il nous semblait intéressant et pertinent de nous entretenir avec celui qui a souvent été surnommé le « Louis Cyr des temps modernes ». Cette rencontre avait pour objectifs, d’une part, d’en apprendre un peu plus sur Hugo Girard lui-même, sur ses réalisations et sur son parcours sportif; d’autre part de voir les traces qui peuvent subsister, aujourd’hui, de Louis Cyr et de sa « légende ». L’histoire et la tradition ont-elles une place dans la pratique contemporaine des sports de la force ?


Girard, tout d’abord bonjour, et merci d’avoir accepté notre proposition d’entrevue. Vous avez commencé à vous entrainer très tôt dans votre jeunesse. Qu’est-ce qui a déclenché cette passion pour l’entrainement et pour la force? Aviez-vous des motivations précises dès votre jeune âge, et quel support avez-vous reçu de votre entourage familial et sportif?

Les Héros du samedi était une émission de Radio-Canada qui s’intéressait aux jeunes athlètes du pays et qui en présentait les exploits.

Moi, ce n’est pas compliqué, mon père s’entrainait. À l’âge de 5 ans, j’ai eu mes premiers haltères et je faisais les mouvements que lui faisait. Mon père, à mes yeux, c’était le plus fort. Il était costaud, c’était mon idole. Un peu plus tard, je lisais des bandes dessinées, et les personnages étaient musclés et très forts. Dans ma tête d’enfant, je m’imaginais être un superhéros; je m’imaginais être doté d’une force surhumaine et d’un physique impressionnant. Puis, à l’âge de douze ans, j’ai vu une compétition d’hommes forts à la télévision, c’était aux Héros du samedi, et à partir de ce moment-là, c’était ça… Je suis allé voir ma mère et je lui ai dit qu’un jour j’allais être l’homme le plus fort du monde.

La saga des héritiers de Louis Cyr

Par Serge Gaudreau, historien

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Introduction

Louis Cyr. Image tirée de l'ouvrage Les rois de la Force d'Edmond Desbonnet, p. 465.

Louis Cyr. Image tirée de l’ouvrage Les rois de la Force d’Edmond Desbonnet, p. 465.

Il y a un peu plus d’un siècle, le 10 novembre 1912, Louis Cyr s’éteignait. La mort de celui qui, à son apogée, était considéré comme l’homme le plus fort au monde, survient au cœur d’une période creuse pour les concours d’haltérophilie qui peinent à intéresser le public. Loin de ranimer la ferveur, la rivalité entre ceux qui se proclament ses héritiers contribue au contraire à accélérer la disparition de cette fragile tradition qui se confirme au cours des années 1920[1].

Une petite page d’histoire se tourne au cours de l’année 1900 alors que le célèbre Louis Cyr annonce publiquement qu’il renonce à son titre de champion du monde des hommes forts pour le céder à son ami et compagnon de tournée, Horace Barré[2].

Champion du monde des hommes forts ! Le titre paraît prétentieux. Pourtant, Cyr le revendique avec une légitimité qui est reconnue non seulement dans le pays où il a vu le jour, le 10 août 1863, mais également aux États-Unis et en Angleterre où il a eu la chance de faire la démonstration de sa puissance[3].

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