Appel à participation à la journée d’étude : « Les exils, le Québec et la formation de la gauche »

Publié le 23 novembre 2018

Par Stasis – Groupe d’enquête sur le contemporain

22 mars 2019, Lieu à déterminer.

Exil

  1. Expulsé
  2. Chercher refuge dans un territoire étranger
  3. Avoir perdu sa maison ; mais aussi, chercher un chez-soi
  4. « L’état ou la situation dans lequel tu ne peux vivre dans ton pays d’origine, pour des raisons politiques ou comme punition. »
  5. D’une tradition yiddish montréalaise : Golis / Gulis « La vie qui n’est pas comme elle le devrait. »

La figure de l’exil existe dans la littérature, la poésie, les arts et les milieux académiques comme symbole de l’expérience fondamentalement humaine du mouvement et de la mobilité. L’exil évoque des images de départ et d’arrivée, d’évasion et de recherche d’un nouveau foyer, de changement et de nostalgie. Elle unit ainsi les expériences plurielles des immigrant.e.s, réfugié.e.s et communautés ethniques du Québec – qui partagent dans leurs différences cette expérience de venir de quelque part, de chercher ailleurs un nouveau chez-soi, avant d’accoster finalement sur les rives du soi-disant Canada. Tout au long de l’histoire de ce territoire, l’afflux de nouveaux arrivant.e.s a entrainé la renégociation des frontières, de l’appartenance et de l’adhésion à la société québécoise. Par conséquent, l’exil est attaché à plusieurs autres notions, souvent politiquement chargées : le pays, la langue, la religion, la culture et l’identité nationale. L’exil est une expérience perturbante qui altère le sens de ces concepts pour toutes les personnes impliquées. Toutefois, si l’on parle régulièrement de l’expérience de l’exil tel que vécu de l’extérieur, on néglige souvent les histoires de ceux et celles qui vivent l’exil de l’intérieur en raison des processus de génocide, d’assimilation, de migration forcée, de réinstallation et de mouvement qui ont fait d’elles et eux des étrangers dans leur propre pays. Le cas le plus notoire est celui des communautés autochtones et de leur rencontre avec les premiers colons français ou avec les vagues plus tardives d’immigrant.e.s en provenance d’un peu partout sur la planète.

Pour qui, donc, le Québec est un chez-soi ? Comment le Québec a-t-il été transformé par ceux et celles qui portent en eux diverses compréhensions de l’appartenance et de l’accueil ? Comment la gauche organisée, en particulier, a-t-elle répondu à travers le temps à ces nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes, et a-t-elle été affectée par celles et ceux-ci ? Comment les immigrant.e.s et les communautés ethniques ont-ils participé à la transformation des institutions québécoises et de la mémoire nationale? Il n’y a aucun doute que l’« exil » – englobant autant les communautés autochtones, les minorités établies que les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes – est au cœur du développement du paysage socio-économique et culturel du Québec. Toutefois, on n’a pas porté assez attention à son rôle lors des moments charnières de changements sociaux.

L’histoire de l’exil n’en est pas seulement une d’exclusion politique et sociale. Au contraire, ces formes d’exclusions ont développé chez plusieurs de ces actrices et acteurs une sensibilité critique et une créativité politique – bref un avantage épistémique – qui les a inspirés à agir en solidarité avec des causes sociales plus larges. Parmi les nombreux exemples de ces mouvements de gauche, pensons à la grève des Irlandais.e.s contre les conditions de travail déplorables lors de la construction du canal Lachine ou à la grève des Fro dans les mines du Nord-du-Québec. De même, l’organisation ouvrière des juif.ve.s, des polonais.e.s, des grec.que.s ou des haïtien.ne.s illustre la force de cette sensibilité critique. Cet avantage épistémologique a nourri plusieurs autres luttes. Prenons pour exemple la manifestation antiraciste contre la brutalité policière de 1932 qui a suivi le meurtre d’un Montréalais d’origine polonaise. Néanmoins, ces histoires demeurent trop souvent marquées par l’oubli dans l’imaginaire populaire.

La domination d’une mémoire de la majorité « québécoise » a éclipsé l’expression politique de minorités dont les histoires ont été à maintes reprises marginalisées et secondarisées, tout comme l’ont été le mouvement des femmes, le mouvement ouvrier, l’activisme antiraciste ou l’accueil des réfugié.e.s. Bien que marginalisées ou oubliées, ces histoires doivent être ramenées à la vie. Dans cette perspective, Stasis vous invite à déposer des contributions (textes, contributions à des panels, exposition, vidéos et autres supports créatifs) qui examinent dans une perspective critique les histoires des immigrant.e.s, des communautés allophones et des communautés autochtones du Québec et leurs interactions avec les mouvements sociaux associés à la gauche. Nous sommes particulièrement intéressé.e.s aux contributions qui analysent la perspective et l’expérience de ces communautés d’exil – tel qu’exemplifiées ci-haut.

Cette journée d’étude nous permettra de dépasser cette amnésie historique causée par les nationalismes. En répondant aux oublis ici soulignés, nous espérons faire davantage que rendre justice à ces communautés. En allant au-delà d’une quête de culpabilité et de responsabilité dans l’histoire, nous visons à construire un narratif qui valorise la puissance épistémologique et politique des exilé.e. s au « soi-disant » Québec. Pour participer, veuillez envoyer un résumé de 200-250 mots de votre contribution (en français ou en anglais) au collectif.stasis@gmail.com.

La date limite pour soumettre un résumé est le 21 janvier 2019. L’événement se tiendra le 22 mars 2019 dans un lieu encore à décider.

Pour toutes questions, veuillez nous contacter au collectif.stasis@gmail.com.